Les droits de l'homme malmenés au pays de Voltaire !
































Cela va mal au pays de Voltaire de Rousseau, de Rabelais et de Hugo ! Si l’hexagone persiste sur ces chemins sociopathes, le premier siècle du nouveau millénaire ne sera pas celui des Lumières mais celui des Ténèbres ! Le Renifleur, déjà enrhumé par les courants d’airs givrants qui circulent, tant sur la Toile que dans la « réalité vraie » ne sait plus où donner du pif ! Il livre donc à votre réflexion les bonnes feuilles du dernier rapport moral adopté le 2 avril 2011 par la Ligue des Droits de l’Homme… Et comme disait Hubert-Félix Thiéfaine : « Si ça continue… Faudra que ça cesse ! » Alors ne restez pas les bras croisés scotchés devant votre étrange lucarne à bailler devant le mariage princier de Ken et Barbie (turique) : Résistez !

Crise européenne













Depuis plus d’un an, les opérateurs souvent spéculatifs qui se cachent derrière l’abstraction des « marchés financiers », à peine  renfloués par l’argent public au prix d’un endettement aggravé des Etats, attaquent les pays européens les plus fragiles (Grèce, Irlande, Portugal, etc.), à quoi les gouvernements concernés répondent par des plans d'austérité sans précédent (Grèce, Irlande, Portugal, mais aussi Royaume-Uni) avec de terribles conséquences sociales et un risque évident, à terme, pour les équilibres démocratiques. Dès lors que les agences de notation se substituent au suffrage universel pour juger les politiques publiques, aux salariés de payer la note du casino financier…






















Et la coordination renforcée des politiques économiques européennes face à cette crise s'oriente à son tour vers une stratégie déflationniste, allant jusqu'à des interdictions constitutionnelles des déficits budgétaires aussi dangereuse qu'irréaliste : comment la baisse des revenus et des dépenses sociales ne ferait-elle pas croître encore davantage endettement et crises budgétaires ? Qui n’a pas oublié les leçons des années 1930 conçoit aisément que ces choix désastreux entrent dans notre champ légitime de préoccupations.

Répressions, dictatures et dénis de démocratie


Pendant la crise financière et sociale mondiale, les violations des droits ont continué à abonder au point d’exclure ne serait-ce qu’une énumération exhaustive. Mais les gouvernants qui s’y adonnent ont de plus en plus de difficultés à faire taire l’aspiration à la liberté, que ce soit en Palestine où la poursuite de l’embargo contre Gaza et de la colonisation en Cisjordanie ajoute, année après année, l’injustice à l’injustice, en Iran particulièrement depuis les protestations de masse contre la fraude électorale en juin 2009, en Chine où l’emprisonnement pour délit d’opinion du Prix Nobel Liu Xiao Bo ne suffit pas à juguler l’antagonisme entre transformations économiques et archaïsmes politiques, en République démocratique du Congo où les massacres s’accumulent et où les défenseurs des droits sont en grave danger dans l’indifférence de la « communauté internationale », en Côte d’Ivoire où la contestation du maintien du chef d’Etat sortant par tous les moyens, débouchant sur de sanglants affrontements et sur de très graves violations des droits, met l’ensemble des despotes du continent africain devant leurs contradictions… et bien sûr, depuis le début de cette historique année 2011, dans toute la zone Maghreb-Moyen-Orient, de Tunisie en Egypte, en Libye, au Yémen, au Bahreïn, en Syrie mais aussi en Algérie, au Maroc, etc.
















En dépit des répressions parfois féroces, des centaines de morts, et des réactions extrêmement sélectives, d’un Etat à l’autre, des gouvernants des pays démocratiques (à commencer par le fiasco de la diplomatie française engluée dans les villégiatures despotiques), les contradictions de la mondialisation sont désormais en pleine lumière. Que faire des moyens de communication électronique instantanée indispensables aux échanges marchands mais si précieux aussi pour contribuer aux mobilisations citoyennes ? Comment « gérer » l'augmentation du nombre de diplômés privés d’emplois qualifiés, l'interpénétration des modes de vie qui sape les propagandes relativistes ? Etc. Cette tectonique des plaques n’a pas fini de secouer les constructions vermoulues et les compromissions branlantes de l’ordre ancien.

Déceptions européennes





















Depuis que la chute du « Mur » a réunifié, au moins potentiellement, l’espace politique européen, une génération de gouvernants ne parvient manifestement pas à hisser l’Union à la hauteur des défis historiques de la période. C’est vrai, on l’a vu, de politiques économiques et sociales qui risquent d’aggraver la crise mondiale au lieu de la combattre, comme si les fauteurs de régressions non seulement ne réparaient pas leurs erreurs mais y persistaient. Mais ce n’est pas moins frappant lorsque la « Sainte-Alliance » européenne (antiterroriste, anti-« islamiste ») avec les despotes se retrouve prise à contre-pied par l’effondrement des Ben Ali et des Moubarak piliers de la fantasmatique « Union pour la Méditerranée », ou enlisée dans une contradiction à la limite de l'illisible lorsque l’on intervient militairement contre le despote libyen reçu naguère en grande pompe… en détruisant les armes qu’on lui a si obligeamment vendues pendant tant d’années.

Il ne s’agit pas seulement là des foucades en zigzag de la diplomatie française et de leur exploitation électoraliste à la petite semaine, mais aussi du complexe obsidional de l’Europe qui se voudrait forteresse... y compris face au « printemps des peuples arabes », alors qu’à l’évidence la dynamique de démocratisation en rive sud de la Méditerranée appelle « des ponts, pas des murs ».

Un tournant dans le quinquennat
















Les contradictions croissantes 
du sarkozysme gouvernant

Ce qui avait fait la réussite électorale de 2007 — utilisation des thématiques du travail et du pouvoir d'achat, siphonage de l’électorat d'extrême droite par les provocations symboliques autour de l’identité nationale — se transforme, chaque mois davantage, en causes d'échec et de difficultés croissantes pour le pouvoir : la mise en tension permanente de la société ne fonctionne plus et insupporte de plus en plus de citoyens, y compris de ceux qui s’étaient initialement laissé séduire.

Mais les politiques de fragmentation sociale destructrices de solidarités — solidarités intergénérationnelles autour des retraites, solidarités  interterritoriales avec la démolition de la politique de la ville et aussi avec la « contre-réforme territoriale », solidarité internationale face aux réfugiés haïtiens et aux réfugiés en Méditerranée présentés comme un péril migratoire — obligent sans cesse le principal gouvernant à renforcer sa stratégie de stigmatisation voire d'ethnicisation du politique : solidarités ou logiques de boucs émissaires, nul ne peut échapper à ce choix.






















De ce point de vue, un tournant décisif a été pris au cours de l’année 2010 : abandon de la logique du « Grenelle de l'environnement » en début d'année, virage vers l'extrême droite au cours de l'été, offensive contre les retraites au second semestre (abandonnant d’ailleurs une promesse de campagne de 2007).

Ainsi le choix stratégique de préparation des échéances électorales de 2012 est-il manifestement celui de l'accentuation de la « politique de la peur » qui peut à l’occasion dériver vers une véritable « politique de la haine ». On a déjà entendu un ministre s’inquiéter de ce que les Français ne se sentiraient plus chez eux, une députée proposer que l’on repousse les réfugiés au large des côtes... et ni l’un ni l’autre ne s’exprimaient au nom du Front national. C’est bien dans la majorité actuelle que s’est situé l’épicentre d’une sorte de séisme éthico-politique.

La « République défigurée »

































Ce titre que nous avons donné à notre édition 2011 de L’Etat des droits de l’Homme en France caractérise clairement une situation de véritable crise politique ouverte à l’été 2010 et en voie d’aggravation depuis lors.
Le lien spectaculairement proclamé par le président de la République, lors du tristement fameux « discours de Grenoble », entre immigration et insécurité a officialisé une convergence objective de discours et d’orientations entre l’actuelle majorité et une extrême droite que d’aucuns rêvaient naguère moribonde. L'« invention » des Roms comme fauteurs de troubles, alors qu’ils n’avaient pris aucune part aux tensions de Grenoble et de Saint-Aignan en juillet 2010, l’édiction d’une circulaire raciste sur la destruction de leurs campements en août 2010, les réactions de l’Onu (la LDH ayant argumenté avec succès devant le Comité pour l’élimination des discriminations de celle-ci) puis de diverses instances européennes (Parlement européen, Conseil de l’Europe et même Commission européenne, que la LDH avait également saisie en son temps), ont témoigné de la rupture de digues éthiques jusque là relativement préservées.

































Dans le même temps, se sont multipliées les « affaires » concernant la moralité des ministres, allant du plus misérable (les cigares aux frais du contribuable de celui-ci, l’avion privé payé sur fonds publics pour celui-là) au plus révélateur de connivences mortifères : entre le trésorier de l’UMP et ministre du budget et une généreuse donatrice de contributions au financement de la vie politique par ailleurs première fortune de France et heureuse bénéficiaire du célèbre « bouclier fiscal »… puis entre la ministre en charge de la diplomatie française et un non moins généreux organisateur de vols touristiques et d’accueil de luxe en pleine répression des démocrates tunisien… et encore entre les gouvernants actuels et Bernard Tapie, recordman de l’indemnisation du préjudice moral sur fonds publics (quelle victime du cancer provoqué par l’exposition à l’amiante pourrait espérer 45 millions d’euros d’indemnisation à ce titre ?). Tout cela, qui a pesé fortement, en période de crise sociale aiguë, sur l’expression électorale d’un rejet du politique au printemps 2011, illustre une spectaculaire dégradation de la moralité gouvernante dont, à vrai dire, l’exemple venait de haut et de loin, qu’il s’agisse de l’investiture au Fouquet’s, du yacht privé en guise de « retraite pour habiter la fonction » ou encore de l’auto-augmentation de 172% de la rémunération présidentielle.


Enfin, les propos tenus eux aussi de manière répétitive par des gouvernants de premier plan ont contribué à abîmer gravement l’image du politique. Le ministre de l’Intérieur de 2010 est resté des mois en fonctions alors qu’il avait été condamné une première fois pour injure raciste, une seconde pour atteinte à la présomption d’innocence d’un magistrat. A peine a-t-il été remplacé que son successeur, ente les deux tours des élections cantonales, l’a en quelque sorte dépassé dans le goût de la transgression : Français que l’immigration incontrôlée empêche de se sentir chez eux, « croisade » libyenne emmenée selon lui par Nicolas Sarkozy, proposition d’interdire le port de tout signe religieux et l’expression de toute préférence religieuse à tout usager d’un service public… « Bavures », « dérapages » ? Certainement pas : le choix du moment, la persévérance dans la provocation, venant d’un ministre dont chacun sait le rôle politique éminent qu’il joue depuis des années et le caractère fort peu impulsif, témoignent d’une véritable stratégie de « rupture » avec les principes de la République tels que les énoncent les normes constitutionnelles.

































De son côté, le Front national a entrepris avec succès une sorte de ravalement de sa façade communicante visant à dissimuler la permanence du fond sous le rajeunissement et, sur certains terrains, l’adoucissement de la forme, avec une redoutable efficacité en termes d’incarnation d’une image « national-moderne » de l’identité française. Le mouvement concomitant vers l’extrême droite d’une partie de la droite gouvernante donne le sentiment que deux trains roulent l’un vers l’autre et pourraient se rencontrer d’une manière ou d’une autre à la station électorale de 2012.

































Les élections cantonales des 20 et 27 mars 2011 n’ont hélas fait que confirmer ce diagnostic. Niveau d’abstention extrêmement élevé, progression spectaculaire d’un tour à l’autre du vote pour le Front national, recul tout aussi spectaculaire de l’actuelle majorité dû à l’inévitable réversibilité des vases communicants mis en place pour la récupération électorale du lepénisme… et utilisation de l’extrême droite par un nombre croissant d’électeurs pour exprimer à la fois la situation insupportable dans laquelle ils se sentent abandonnés et leur rejet du politique. Or on ne sort d’une crise sociale et politique que soit par la solidarité et le recul des inégalités, soit par la chasse aux boucs émissaires. Et si l’incarnation politique de la seconde issue continuait à l’emporter en visibilité, sinon en crédibilité, sur la première, la « République défigurée » ne tarderait pas à devenir une « République en danger ».

L'état des violations des droits



Atteintes aux droits sociaux

Ces atteintes résultent pour une part importante de la gestion des finances publiques et des prélèvements sociaux : de manière générale, la politique économique, budgétaire (à travers le rouleau compresseur, et destructeur, de la RGPP [revue générale des politiques publiques]), fiscale (de « bouclier » pour les plus riches contribuables en projet de suppression de l’ISF) et de financement de la protection sociale (« franchises » médicales, déremboursements, attaques contre les retraites…), constamment tournée vers un partage inégal des charges publiques et sociales, accroît les effets de la crise et nourrit un profond sentiment d'injustice.


















Elles résultent évidemment aussi d’une accumulation de mesures anti-sociales : « contre-réforme » des retraites, renforcement de la précarité pour les mal-logés (notamment dans la loi Loppsi 2 de mars 2011), mise en danger de l'hôpital public (avec la loi dite « HPST » de juillet 2009)... les atteintes aux droits sociaux s’accompagnant d’un cortège de menaces et de sanctions visant, notamment après la mobilisation sur les retraites, nombre de militants syndicaux.






















Elles se manifestent enfin par la déconstruction méthodique des services publics porteurs de valeurs d’égalité et de solidarité (où l’on retrouve la RGPP… mais aussi la « contre-réforme territoriale » qui met en danger de nombreuses interventions publiques locales) et aussi de ces porteurs de lien social que sont les associations, qui subissent un étranglement budgétaire croissant, sont de plus en plus souvent traitées comme des sortes de prestataires de services devant subordonner leur projet associatif aux priorités de la commande publique, et dont certaines, en particulier dans les champs de l’intervention socio-judiciaire et de la politique de la ville, voient leur action rognée ou entravée par les évolutions des politiques étatiques.

Atteintes aux libertés
















Les mesures « insécuritaires » que nous combattons depuis des années continuent à s’accumuler : loi Ciotti du 28 septembre 2010 sur la privation d’allocations familiales en cas d’absentéisme scolaire ; loi Loppsi 2 du 14 mars 2011, qui même partiellement censurée par le Conseil constitutionnel étend encore les pouvoirs de la police, aggrave la prolifération des fichiers, autorise la création de véritables milices para-policières, étend les mécanismes de « peines plancher » et durcit le régime de la justice des mineurs ; projet de loi sur les « soins psychiatriques sécuritaires » qui prévoit un fichage généralisé des malades mentaux, l’instauration d’un régime de soins sous contrainte à domicile, et refuse l’intervention d’un juge indépendant pour autoriser l’hospitalisation sans consentement de la personne…















S’y ajoutent les dérives persistantes de la gestion policière, avec leurs conséquences en termes de violences (mutilation par flashball à Montreuil en octobre 2010, condamnation en décembre 2010 de policiers pour sévices et falsification de procès-verbal à Aulnay-sous-Bois, etc.), et aussi avec l’effarante explosion quantitative des gardes à vue… censurée successivement par la Cour européenne des droits de l’Homme, par le Conseil constitutionnel (partiellement) et par la Chambre criminelle de la Cour de cassation, ce qui oblige le législateur à en finir avec cette pratique « moyenâgeuse » avant l'été 2011.


La même continuité marque l’inflation du contrôle social. Il en est d’abord ainsi de la prolifération des fichiers, d' « Edvige 2 » en création du passeport biométrique en passant par les excès du fichier « Base-élèves » (censurés partiellement par le Conseil d'Etat en juillet 2010) et par le fichier « Oscar » instaurant le fichage biométrique des Roms et des étrangers « bénéficiant » de l’aide au retour (non censuré, lui, par le Conseil d’Etat en octobre 2010...). Et il en va de même de l’explosion de la vidéosurveillance voulue par l’ancien ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, que beaucoup de villes gérées par l’actuelle majorité… et, hélas, parfois aussi par l’opposition, ont accepté d’accompagner au-delà de toute nécessité d’ordre public.

































Toutes ces atteintes aux libertés peuvent être plus efficacement contestées en raison des nouveaux pouvoirs donnés par la révision constitutionnelle de juillet 2008 au Conseil constitutionnel dans le cadre de la procédure de « question prioritaire de constitutionnalité » (QPC) : il en a été ainsi, dans une mesure cependant limitée, pour la remise en cause de la garde à vue ou encore pour le contrôle judiciaire sur les hospitalisations d’office. Mais d’une part, le Conseil constitutionnel n’étant pas législateur, les véritables solutions ne peuvent passer que par un changement de majorité parlementaire ; d’autre part, si la jurisprudence du Conseil constitutionnel est restée souvent timorée voire décevante, c’est que sa composition ne lui permet pas de jouer le rôle d’une véritable Cour constitutionnelle à même de protéger les libertés de manière satisfaisante… ce qui pose d’ailleurs des questions redoutables lorsque, comme dans la QPC concernant le procès de Jacques Chirac, on imagine mal le président du Conseil constitutionnel statuer sur une procédure visant son mentor politique.

Discriminations et stigmatisations
















Ces dérives, elles non plus, ne sont pas récentes mais se sont fortement aggravées dans la dernière période, et les cibles en sont fort diverses.

Il s’agit d’abord des atteintes à l'égalité femmes/hommes et aux droits des femmes : mise en danger des centres d'IVG ; contre-réforme des retraites pénalisant particulièrement les carrières des femmes ; mode de scrutin uninominal retenu pour l'élection des futurs conseillers territoriaux qui, s’il n’est pas abrogé d’ici 2014, fera considérablement reculer le nombre de femmes élues locales ; etc.

Il s’agit encore, bien entendu, des discriminations « ethniques », du racisme et du ciblage de nouvelles « classes dangereuses » (Roms, Gens du voyage, « Auvergnats », jeunes étrangers privés de football par une réglementation sportive inacceptable, etc.).

































Il s’agit enfin, et peut-être surtout, de la stigmatisation permanente, insupportable, des musulmans : après l’instrumentalisation de l’identité nationale (ministère spécialisé de 2007 à 2010, « débat » sous direction préfectorale en 2009-2010), après la loi sur le « voile intégral » du 12 octobre 2010 qui sanctionne les femmes concernées et non ceux qui les oppriment, le parti dirigé par le président de la République a choisi d’organiser un « débat » portant prétendument sur la laïcité mais dont l’objet réel est, de l’avis de tous les commentateurs, de mettre en examen l’islam comme menace sur ladite laïcité, au point que cette campagne anti-musulmane et son message raciste subliminal suscite des critiques ouvertes jusque dans les rangs du gouvernement…

 « Xénophobie d'Etat »


Sur ce terrain, aussi, les ornières se creusent année après année.

Après l’échec de la tentative de refoulement immédiat de dizaines de réfugiés kurdes arrivés en Corse en janvier 2010, le ministre de l’Identité nationale de l’époque, Eric Besson, prépara un projet de loi destiné à durcir une énième fois les conditions d’entrée et de séjour des étrangers. Le projet créait un nouveau cas de déchéance de nationalité discriminatoire à l’égard des Français d’origine étrangère, qui a été supprimé à la suite de dissensions à l’intérieur de la majorité actuelle. Mais l’aile la plus dure de cette majorité a réagi en durcissant nettement les conditions d’accès à la nationalité, supprimant notamment l’automaticité d’accès (à leur majorité) pour les enfants nés en France de parents étrangers.
















Et le texte voté en deuxième lecture par les députés en mars 2011 allonge à 45 jours le délai de rétention, exclut tout contrôle du juge des libertés sur la légalité des internements administratifs pendant les cinq premiers jours de rétention, instaure un véritable bannissement sous la forme d’une « interdiction de retour », autorise des « zones d’attente fictives » pour paralyser les demandes d’asile dès l’entrée sur le territoire, crée un internement administratif de plus de 18 mois pour « comportement lié à des activités à caractère terroriste », permet le renvoi des étrangers malades même si, dans leur pays, les traitements sont en réalité inaccessibles, facilite le renvoi des citoyens européens pauvres (d’abord les Roms roumains et bulgares) pour « charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale »… cependant que la loi de finances pour 2011 réduit l’Aide médicale d’Etat, c’est-à-dire fragilise gravement l’accès aux soins des sans-papiers malades.














Bien entendu, la chasse aux étrangers ne faiblit pas davantage sur le terrain, qu’il s’agisse des demandeurs d’asile (les Kurdes de Bonifacio...), des sans-papiers bien sûr (les promesses faites aux travailleurs grévistes sans papiers ne sont toujours pas tenues et la chasse aux écoliers et à leurs familles continue) ou de la situation particulièrement scandaleuse sur ce point de l’outre-mer (en particulier en Guyane et à Mayotte) ; et il en est de même de la chasse aux « délinquants de la solidarité » (comme en témoigne notamment la condamnation en appel d'André Barthélemy en décembre 2010). Le tout se prolongeant par le discours présidentiel sur le péril migratoire qui résulterait de la chute des dictatures de la rive sud de la Méditerranée…

Atteintes à la séparation des pouvoirs

































Aux termes de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution. »  Nous sommes toujours plus loin  du compte en la matière.

L’indépendance du pouvoir judiciaire n’est ni garantie sérieusement par l’état de notre droit — au point que la Cour européenne des droits de l’Homme dénie aux procureurs la qualité de magistrats indépendants au sens de la CEDH — ni respectée par les gouvernants actuels : après que l’ancien ministre de l’Intérieur a été condamné pour avoir porté atteinte à la présomption d'innocence d'un magistrat, la tentative présidentielle d’exploiter encore une fois un fait divers tragique pour jeter l’opprobre sur les magistrats, les auxiliaires de justice et les agents de l’administration pénitentiaire, a suscité en mars 2011 un mouvement de protestation d'une ampleur sans précédent dans le monde judiciaire, déjà révolté par la dégradation profonde des conditions de fonctionnement du service public de la justice.
























Quant aux Autorités indépendantes, l'institution d'un Défenseur des droits a été l’occasion, avec la loi organique votée le 15 mars 2011, de faire disparaître celles qui gênaient tout particulièrement les gouvernants actuels (Défenseure des enfants, Commission nationale de déontologie des forces de sécurité, Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité… le Contrôleur général des lieux de privation de liberté n’y ayant échappé que d’extrême justesse).

L’ensemble des constats qui précèdent donne la mesure de l’ampleur de la crise sociale, morale et politique que traverse notre pays. Mais les mêmes facteurs qui l’amplifient provoquent aussi des réactions salutaires auxquelles la LDH contribue dans toute la mesure de ses moyens, en particulier dans la perspective ouverte par sa campagne « Urgence pour les libertés, urgence pour les droits » : « là où croît le danger, croît aussi ce qui sauve… »

Pour en savoir +

Ligue des Droits de l'Homme

Urgence pour les libertés, urgence pour les droits

Non à la politique du pilori

Pacte pour les droits et la citoyenneté

Mais c’est un Homme

Votation citoyenne


Remerciements & crédits illustrations : Anonymes, Placide, Plantu, Inan, Tropic@lboy, lescorbeauxorguais, Coco, Sarkoshow, Faujour, Goubelle, Troud, Large, Gleu, Deligne, R*B, Pancho, Gerda Srabo et enfin Na !